Il y a autant de façons de vivre avec le VIH que de personnes séropositives. Découvre-les et prends la parole à ton tour si tu le souhaites.
Au nom de la défense des droits de l’individu et en réaction à des actes discriminatoires vécus dans notre société, l’ensemble du milieu de lutte contre le VIH respecte des politiques strictes de confidentialité. Ces politiques ont cependant établi une culture du secret qui risque de nuire au changement social que nous revendiquons aujourd’hui toutes et tous.
Je suis séropositif. Je n’en ai pas honte, je ne veux pas cacher ce fait qui fait partie de mon quotidien. Dans la vie, je partage mon vécu, j’écris des articles concernant mon expérience du VIH sous mon vrai nom, et mes biographies incluent toutes la mention de ma séropositivité. Cependant, si demain je meurs, le milieu VIH auquel j’appartiens et auquel je m’identifie, va se souvenir de « Ken M. », plongeant ainsi mon identité dans l’anonymat afin de me protéger d’une discrimination que, vivant, j’aurais préféré affronter. Cette « protection » aura pour effet d’effacer mon existence.
Je reconnais que je suis privilégié. J’ai un emploi que je ne vais pas perdre à cause de mon statut séropositif, j’ai pleinement accès au suivi médical et aux traitements dont j’ai besoin, j’ai le soutien d’un réseau d’ami·es et de ma famille. Je suis conscient que ce n’est pas le cas pour toutes les personnes vivant avec le VIH. Je défends leur droit de choisir quand et à qui divulguer leur statut, mais pour moi, c’est fait – ou ça se fait…un processus continu – et je refuse de me faire renvoyer dans le placard.
Nous soulignons le 17 mai de chaque année la Journée de lutte contre l’homophobie et la transphobie. Nous, séropositives et séropositifs, devons tirer leçon de cette lutte dont la réussite repose essentiellement sur la persévérance. Et ça commence par la sortie du placard : d’abord pour celles et ceux qui, comme moi, vivent dans des contextes privilégiés ; ensuite, quand le moment opportun est venu, pour chaque individu. Et il devient un jour impensable de craindre ou de discriminer cette population dont fait partie mon oncle, ma voisine, le chum de mon ami, la femme de ma cousine.
Je n’exigerai de personne qu’il divulgue son statut s’il ne se sent pas prêt. Mais en revendiquant la sortie du placard comme choix politique, je lance un appel à chacune des personnes vivant avec le VIH, pour notre bien commun. C’est aussi un appel au milieu de lutte contre le VIH à soutenir cette sortie, à promouvoir cette visibilité sociale, et à ne surtout pas la frustrer par des politiques trop rigides.
Je crois fermement que ma visibilité et celle de toute personne vivant avec le VIH est indispensable pour parvenir à faire tomber les préjugés d’une société qui a encore peur de nous, car elle ne nous connaît pas. Une porte de placard non utilisée devient un mur, et quatre murs sans sortie font une prison plutôt qu’un abri.
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